A partir du moment où on intègre que la critique décroissante ne porte pas seulement contre la domination de l’économie sur la société mais contre l’impérialisme du régime de croissance, alors le statut du décroissant doit lui aussi augmenter (acquérir de l’autorité) pour ne plus se contenter d’être seulement dans l’indignation (d’un monde que l’on rejette) ou seulement dans le rêve (des mondes que l’on projette) mais pour pouvoir penser et faire la transition. Un tel statut a pour ambition d’éviter d’être pris en tenaille entre un savoir académique condescendant et une paresse horizontaliste anti-intellectuelle qui, aussi opposés qu’ils le paraissent, ont en commun un même fond d’impolitique, c’est-à-dire de Petite politique. Pourquoi est-ce au militant-chercheur d’assumer un tel statut ?
Parce que c’est lui qui a la charge de politiser le trajet, la décroissance.
Un « antépisode » est le terme canadien pour « préquelle ». « Exotérique » est le contraire d' »ésotérique ».
- Vous publiez dans le numéro 0 de la revue de l’OPCD, Mondes en décroissance, un « portrait du décroissant en militant-chercheur ». Ce qui semble assez provocateur car, avant même de penser leur conjonction, il est difficile de savoir s’il est plus étonnant de présenter le décroissant comme un « chercheur » ou comme un « militant ». En effet, la décroissance n’est-elle pas porteuse d’une double critique dirigée autant contre le progrès – dont la science est le principal vecteur –, que contre cette forme classique d’engagement politique qu’est le militantisme ?
Il me semble important de commencer en tenant un parallèle entre ces deux aspects, celui de chercheur et celui de militant. Parce que dans les deux cas, la critique repose, se fonde, sur une méfiance qui pourrait être porteuse d’un refus : arrêt de toute recherche scientifique, évitement de toute forme militante.
- Débutons par la recherche scientifique, pourquoi s’en méfier?
L’un des piliers du monde de la croissance est l’adhésion à la fable du progrès – chacun peut comprendre le lien entre une croissance économique qui est à elle-même sa propre finalité et un progrès que « l’on n’arrête pas » –, et au cœur de cette marche inéluctable, il y a la science dont les incessants « progrès » alimentent le moteur d’une recherche insatiable.
On se retrouve là d’emblée au cœur d’une survalorisation de l’illimitisme comme première source de méfiance de la part de la décroissance qui, tout à l’opposé, accorde une valeur intrinsèque aux limites en tant que telles.
Et puis historiquement, l’essor moderne des sciences est d’abord l’essor des technosciences, ou pire l’essor d’un complexe industrialo-scientifique ; et pire encore, ce complexe est souvent militaire avant d’être civil. Il y a là de quoi largement alimenter les méfiances de la décroissance à condition qu’elle assume d’être technocritique, antiproductiviste et pacifiste.
Quand l’utilité de la recherche scientifique est réduite à ses applications, à ses utilisations, alors elle devrait susciter une méfiance contre une telle justification par le seul utilitarisme.
- Mais alors faut-il abandonner toute recherche scientifique ?
Je rappelle dans mon article la décision radicale du mathématicien Alexandre Grothendiek qui a « abandonné toute espèce de recherche scientifique » (1972). Je rappelle aussi les positions du groupe Oblomoff (créé en 2004) qui publie une plateforme1 au titre explicite : « Pourquoi il ne faut pas sauver la recherche scientifique », dont le chapeau est parfaitement clair : « La question n’est pas de rapprocher la science du citoyen, mais de casser la logique de l’expertise, de dénoncer le mensonge de la neutralité de la recherche et d’empêcher la science contemporaine de contribuer, au jour le jour, à détruire la politique, la remplaçant par une affaire technique ».
Il ne s’agit donc pas tant de refuser la science que de refuser sa dépolitisation. Et comme une souhaitable repolitisation de la recherche présuppose une radicale décolonisation de l’imaginaire scientifique, je réévoque mon idée d’un moratoire de la recherche scientifique, à partir d’une redéfinition de la recherche scientifique comme extraction de connaissances. Jusqu’à quel point est-il pertinent de considérer le savoir comme un stock inépuisable et gratuit ? Scientifiquement, on a déjà beaucoup extrait de vérités mais ce que l’on trouve aujourd’hui produit de plus en plus des applications aux effets de plus en plus lointains2 – et la responsabilité s’éloigne d’autant, pourquoi continuer à chercher ? Pourquoi, en tant que décroissant ne pas défendre la proposition politique d’un moratoire sur la recherche dans l’industrie technoscientifique, au moins le temps de (re-)prendre connaissance des effets des applications déduites des savoirs déjà engrangés ?
- Poursuivons le parallèle critique entre recherche scientifique et engagement politique ; pourquoi s’en méfier et comment y retrouver ce même péril de la dépolitisation, ce qui semble paradoxal quand il s’agit d’engagement et d’activisme ?
C’est qu’en fait il faut distinguer plusieurs formes d’engagement. Il y a bien sûr celui du militant traditionnel, adhérent d’un parti politique, mettant son temps et son énergie à soutenir une « cause ». Il y « croit » d’autant plus qu’il dispose au préalable d’une grille idéologique au travers de laquelle tout événement fera sens en se situant par rapport à un objectif déterminé. Bref, il croit appartenir à une avant-garde éclairée, comme s’il pouvait envisager les situations de l’extérieur, en spectateur connaissant à l’avance le programme. Toute cette anticipation idéologique a juste pour fonction de mettre l’engagement du militant au service d’une stratégie de conquête du pouvoir central, que ce soit par la rue ou par les urnes. On trouve ainsi dans le rapport à l’idéologie comme dans l’engagement un même schéma, celui d’un pouvoir conçu comme verticalisme descendant.
- Mais cet espoir de changer le monde par la prise préalable du pouvoir – ce que l’on appelle une stratégie de renversement – n’a jamais réussi et cela les décroissants semblent l’avoir intégré, en abandonnant assez rapidement toute tentative de créer un parti politique de la décroissance.
Tout à fait et c’est précisément cette lucidité qui, par un mouvement classique d’oscillation qui fait que la critique d’un excès fait basculer dans l’excès contraire, amène le plus souvent les décroissants à envisager l’engagement non plus par l’adhésion à un parti mais par participation active à ce qu’ils appellent les « alternatives concrètes ». Ils s’inscrivent là – sans toujours vraiment le savoir – dans une lignée inaugurée dès le 19ème siècle par le « socialisme utopique ».
- Mais cette autre façon de penser le changement – par une stratégie de basculement – a-t-elle mieux réussi ?
Marx, qui avait le sens de la formule, se gaussait déjà de ceux qui croyaient pouvoir « faire la révolution sur 15 km² » et qui confondaient la propagande et la propagation. Il n’empêche que ce filon des utopies concrètes est aujourd’hui largement exploité par une autre figure de militant, le « militant alternatif » : il est dans l’action mais comme il ne croit plus beaucoup à la dimension politique de l’espace public, il se satisfait vite de se replier sur ses propres alternatives, qu’il pratique aussi bien individuellement qu’au sein de son groupe affinitaire.
- N’est-ce pas un peu sévère de renvoyer comme cela de telles initiatives vers le repli sur soi, vers l’entre-soi ? Car enfin, aussi bien les démarches individuelles de la simplicité volontaire que les initiatives collectives – qui portent sur des habitats coopératifs, sur d’autres façons de produire, de consommer, d’utiliser l’énergie, de se soigner, de se cultiver – ne sont-elles pas des contributions qui préfigurent déjà les mondes dont nous rêvons et qui, si elles essaiment, atteindront une masse critique qui pourra provoquer une grande bifurcation ?
La réponse la plus bienveillante que l’on peut faire est d’accepter de juger que toutes ces initiatives sont nécessaires – individuellement, elles permettent à chacun de consolider son « ossature morale » et collectivement, elles sont l’occasion de belles dépenses d’énergies – mais ce qu’il faut se demander c’est si, politiquement, elles sont suffisantes.
- Mais il y a en a partout, et de plus en plus…
Est-ce vraiment une question de quantité ? Parce que dans ce cas, il faut oser regarder les résultats en face : quelle est la part du bio dans la consommation, et quel bio… quel est le volume des échanges en monnaie locale… quelle est la proportion de l’économie sociale dans l’économie nationale…
Les chiffres fournis par l’Atelier paysan dans son manifeste3 roboratif sont éloquents. Un seul exemple, Terre de liens existent depuis 20 ans, avec un travail formidable qui a permis à l’association d’acquérir 302 fermes (fin novembre 2022). Mais, dans le même laps de temps, combien de fermes ont disparu ? Entre 200 et 260 fermes… par semaine. 1 ferme maintenue pour près de 1000 qui s’éteignent !
- Ce n’est pas rien. Mais c’est microscopique, en effet.
Ce sont les chiffres, comme on dit. Mais, le plus intéressant dans ce livre-manifeste, ce ne sont pas ces constats, c’est le diagnostic. Il est lucide : « Que l’on ne nous raconte pas qu’on est en train de gagner, que les bonnes pratiques s’étendent et que la société se transforme actuellement dans le bon sens. » « La doxa d’un « changement positif en marche », d’une transition « inéluctablement en route » est tenace et nous étouffe de son apolitisme assourdissant. »
- Finalement, vous dénoncez une double dépolitisation. Chez le militant traditionnel, par son activisme totalement encadré dans une idéologie descendante et chez le militant alternatif, il y a certes beaucoup d’actions et de bonnes volontés mais, et je reprends une formule de l’Atelier Paysan, on n’y trouve « pas de stratégie qui les met en cohérence ; pas d’espace politique pour la construire. »
Dans les deux cas, on peut en effet regretter une même dépolitisation comme passivité idéologique. Chez l’un, ce à quoi il s’accroche encore, c’est à une vulgate idéologique descendante, parachutée – et il n’y a qu’à voir comment, dans les partis, les adhérents se soumettent d’autant plus à des parodies de démocratie et de participation qu’elles sont affichées et revendiquées – et chez l’autre, il n’y croit même plus.
C’est cette absence d’activisme idéologique qui me semble le symptôme commun à ces deux formes d’engagement. Symptôme qui atteint son apogée dans la figure du « militant-agenda » : le lundi, il va chercher son panier amap qu’il paie en monnaie locale, le mardi il va consommer une conférence sur la décroissance, le mercredi c’est yoga ou feng-shui, le jeudi il a une réunion dans son association caritative, le vendredi il signe des pétitions, le samedi il défile au nom d’une lutte nationale et le dimanche il va soutenir une lutte locale. Il n’arrête pas : s’il manque d’idées, il peut toujours affuter sa conscience en suivant le calendrier des journées et des semaines internationales4.
- Pourriez-vous préciser ce que vous entendez par « passivité idéologique » et par « activisme idéologique ». On voit bien que « passivité » n’est pas « inactivité » et aussi que l’activisme qualifié d’idéologique ne peut pas se résumer à engager des rapports de forces. Mais encore…
Ce sont des distinctions très importantes, à ne pas négliger, car je ne crois pas qu’il soit juste de qualifier les stratégies de basculement – par essaimage des alternatives concrètes – de « dépolitisées ». C’est pourquoi je préfère parler d’impolitisme que d’apolitisme, même si je suis d’accord que, dans les deux cas, ils sont assourdissants. Je les vois plus comme des voies politiques sans issues, des impasses, que comme des actions dénuées de toute dimension politique.
Elles ne sont pas au degré zéro de la politisation mais dans une « politique minimale ». Je construis cette expression de « politique minimale » sur le modèle de l’expression de « morale minimale », que le philosophe suisse Mark Hunyadi qualifie péjorativement – à raison – de « Petite éthique ». Je poursuis donc mon analogie en reprochant aux alternatives concrètes d’être dans une « Petite politique », ce que quelquefois j’appelle une « Politique des confettis ».
Pour Mark Hunyadi, l’inflation des petites éthiques – médicale, de l’environnement, de la recherche, de la science, des nanotechnologies, des affaires, de la famille, sexuelle, du fonctionnaire, de la citoyenneté, du capitalisme, du travail, de l’alimentation, de la religion, du sport, du tourisme, de la monnaie… – a pour fonction d’éviter de poser une Grande éthique, et a pour effet de contribuer à la neutralisation éthique du monde. Car toutes ses petites éthiques qui mettent en avant le respect des droits individuels permettent surtout de faire avaler le système dans son ensemble : car, à dénoncer telles imperfections du système, elles esquivent la dénonciation du système lui-même. « Cette éthique restreinte ou éthique des principes est donc fondamentalement acritique : sous couvert de veiller à la norme suprême du respect des droits individuels, elle sert en fait à blanchir éthiquement des pratiques dont elle se garde bien d’interroger le caractère éthique général. Elle est acritique mais elle est loin d’être axiologiquement neutre : la valeur qu’elle privilégie par-dessus tout, c’est le cours du monde lui-même »5.
- Dans son livre, Mark Hunyadi montre les deux faces de cette neutralisation éthique du monde : l’absence d’une Grande éthique par la prolifération de petites éthiques d’un côté, la tyrannie des modes de vie de l’autre. Si on poursuit encore le rapprochement, peut-on aller jusqu’à penser que cette tyrannie des modes de vie passe aussi par une neutralisation politique du monde ? Et j’ajoute : cette tyrannie des modes de vie n’est-elle pas justement le mode d’existence du « régime de croissance », c’est-à-dire l’extension du concept économique de croissance à tout un monde et son idéologie ? Cela fait beaucoup de questions, pourriez-vous commencer par nous préciser le lien entre « modes de vie » et « régime de croissance » ?
Je reprends la conception des modes de vie de Mark Hunyadi – même si là où il y voit la marque du capitalisme avancé, j’y vois plutôt son dépassement 6 par ce qu’Onofrio Romano nomme « régime de croissance ».
Ce qu’il appelle « mode de vie » me semble être comme le revers de ce que l’économiste libéral Friedrich Hayek plaçait au cœur de son idéologie quand il opposait deux sources d’ordre : l’ordre artificiel d’une l’organisation (Taxis) et l’ordre spontané d’un organisme (Kosmos). Pour ce dernier, « le point de départ de la théorie sociale […] est la découverte qu’il existe des structures ordonnées, qui sont le résultat de l’action d’hommes nombreux mais qui ne sont pas le résultat d’un dessein humain »7. Autrement dit, comme l’écrivait Adam Smith, l’homme est conduit à promouvoir un résultat qui ne faisait pas partie de ses intentions : un tel résultat peut être la résultante spontanée, non-intentionnelle, d’actes individuels accomplis volontairement.
Mais là où le libéralisme raconte que des bénéfices publics pourraient provenir des vices privés (Bernard de Mandeville), Mark Hunyadi montre au contraire que les petites éthiques produisent une tyrannie.
Car les individus ne se socialisent qu’en conformant leurs pratiques et leurs manières d’être à des attentes8 déterminées par le système des modes de vie. « Un mode de vie résulte d’une somme de phénomènes s’entraînant les uns les autres (développement causal…) où beaucoup d’individus ont certes à chaque fois leur part, même si personne ne les a additionnés (… mais pas finaliste) »9.
Ainsi les modes de vie ne sont pas choisis, mais imposés ; et dans la vie quotidienne chacun s’y conforme précisément en s’ajustant à l’aide des petites éthiques et politiques. Et comme ces petites normativités et ces petites contraintes ne posent jamais la question du système en tant que tel, ce dernier peut installer sa tyrannie. Un « style de vie » peut permettre de choisir son métier mais personne n’échappe à la division du travail comme mode de vie.
Que ce soit éthiquement ou politiquement, le régime de croissance s’impose par des modes de vie qui ne sont jamais démocratiquement et globalement mis en discussion parce que les petites éthiques et les petites politiques occupent déjà le terrain. La Petite politique est, au sens de diversion, ce que Pascal nommait un « divertissement » : une éthique des affaires détourne de poser la question politique du capitalisme financier, une éthique du consentement médical évite d’interroger la déshumanisation de la médecine, la gestion des risques technologiques invisibilise l’emprise de la technoscience….
- Pourriez-vous maintenant préciser en quoi ce régime de croissance – ou cette tyrannie des modes de vie – se manifeste par une Petite politique, celle de la passivité idéologique. Ou, plus positivement, en quoi la figure du décroissant en « militant-chercheur » aura pour objectif celui d’une politisation par l’activisme idéologique évoqué précédemment ?
Cela fait plus de treize ans que j’avais proposé dans un texte 10 – Les trois pieds politiques de l’objection de croissance – de m’appuyer sur ce que Timothée Parrique nomme ma « triade » : rejet, trajet et projet. Aujourd’hui, la moitié du combat porté par ces distinctions me semble gagnée : c’est la distinction entre trajet et projet qui structure les chapitres 6 et 7 du livre de Timothée. C’est aussi cette distinction qui peut être dénommée avec précision sous les noms de « décroissance » et de « post-croissance ». Et même quand, par ruse rhétorique, plutôt que de dire « décroissance », on écrit « transition post-croissance », l’idée de la décroissance comme décrue, trajet, transition me semble acquise : il ne s’agit pas seulement d’arrêter la croissance mais de l’a diminuer l’inverser, tant que les plafonds de la soutenabilité écologique ne sont pas retrouver, dans un état stationnaire.
Mais il reste une seconde moitié : c’est de concentrer nos efforts théoriques, conceptuels, idéologiques pour penser la mise en place du trajet en tant que tel. Or, c’est vraiment là que la Petite politique peut faire le plus de dégâts : certes nourrie de toutes les indignations du rejet, certes alimentée par tous les rêves du projet, la question du trajet – la décroissance – n’y est pas toujours la bienvenue. On peut le voir encore par exemple quand on essaie de dire que la décroissance économique sera bien une « récession » mais pas une « dépression », quand muni des notions de plancher et de plafond on essaie de défendre la pauvreté en renvoyant dos à dos la misère et la richesse, quand on multiplie les déclinaisons de la décroissance par des mots en « dé- » : déproductivité, désindustrialisation, démantèlement, démarchandisation, détravail, déconsommation, démobilité, démétropolisation, déconnexion…
C’est ainsi que je définis la Petite politique par toutes ces petites politisations qui font l’impasse sur les difficultés intrinsèques du trajet : soit en les édulcorant par les stratégies déceptives et iréniques du renversement (prise du pouvoir) et du basculement (essaimage), soit en les esquivant par un scénario d’effondrement (collapsologie), soit en les niant carrément en racontant que la transition serait déjà partout… en marche.
Entre rejet et projet, l’activisme idéologique est au contraire celui qui refuse de sauter l’étape politique intermédiaire du trajet, parce que c’est la plus difficile non seulement conceptuellement mais aussi sensiblement. Dans le rejet et le projet, la spontanéité sensible peut même inciter à croire que le travail théorique est perte de temps et d’énergie : au fond il est plus facile de s’indigner et de rêver que de conceptualiser, de problématiser et de définir. Voilà pourquoi le moment intermédiaire du trajet semble la première victime de la Petite politique.
- « Intermédiaire » semble un terme décisif. D’abord parce qu’on vient de voir qu’un mode de vie est un intermédiaire, « à l’interface du système et de l’expérience sociale telle qu’elle est vécue par les acteurs », écrit Mark Hunyadi. Ensuite, parce que ce qui se joue dans cet intermédiaire, dans ce milieu, c’est toute la distinction que vous faites entre « vie en société » et « vie sociale ». Mais alors, en quoi ce « militant-chercheur » est-il un intermédiaire entre le militant et le chercheur, puisque l’on devine que vous attendez de lui qu’il porte ce retour en force du politique dans le domaine du savoir comme dans celui de l’activisme ?
D’autant que vous semblez avoir ajouté une nouvelle difficulté : si vous vous méfiez et de la figure du militant et de celle du chercheur, en défendant celle du « militant-chercheur », est-ce que vous allez additionner leurs défauts ou bien simplement prendre chez l’un pour compléter ce qui manque à l’autre ?
Commençons par dire que le milieu dans lequel s’active celui que j’appelle le militant-chercheur est la vie sociale à la fois comme condition – la vie sociale précède la vie engagée – et comme objectif – pour la conserver, la protéger et l’entretenir. C’est au milieu de la vie sociale qu’à lieu l’activisme idéologique. Le militant-chercheur est un activiste de vie sociale.
Si l’on veut explorer idéologiquement ce qui se passe dans cette vie sociale, une des meilleures pistes à suivre est celle aujourd’hui esquissée par le sociologue allemand Hartmut Rosa avec son concept de « résonance ». Il n’a pas été assez remarqué qu’après avoir défini l’accélération comme aliénation, au moment de donner son contraire, ce n’est pas le ralentissement que met en avant Harmut Rosa mais la résonance.
Pourquoi ? Parce que ce qui fait de l’accélération une pathologie sociale c’est qu’elle est une « relation sans relation » : la triple accélération – technique, du changement social et des rythmes de vie – dénoncée par Harmut Rosa est aliénation parce qu’elle « sature » la construction sociale de chacun : si la construction de notre identité est saturée, comment en irait-il autrement des relations que nous pourrions établir avec les autres ? Et avec le monde ?
Dans une relation sans relation, je ne rentre pas en résonance, je reste spectateur au lieu d’être relié par « une corde vibrante » à un fragment du monde.
- Mais l’objectivité du chercheur ne vient-elle pas de sa position de spectateur, qui lui permet d’être détaché de l’objet de son observation ?
On peut déjà dire que si le militant-chercheur doit se situer au milieu de la vie sociale, ce ne sera pas en tant que spectateur – alors qu’en tant qu’observateur11 impliqué, il fait partie de l’observation et son idéal normatif, qu’il soit politique ou épistémique, doit être l’impartialité et pas du tout la neutralité. Et voilà pourquoi j’ai précédemment reproché aux chercheurs comme aux militants-mirador de se cantonner à des postes d’extériorité, d’être « extra-situationnels ». Quand on regarde un tout de l’extérieur, alors il peut sembler composé d’éléments juxtaposés. Mais dès que l’on se place au milieu (et pas au centre), on peut observer – et ressentir – que c’est de relations qu’il est composé.
Il faudrait là aller chercher la justification la plus fondamentale dans ce qui pourrait être l’ontologie de la décroissance. Et ce serait une ontologie relationnelle parce que, elle seule, met en lumière, pour la critiquer, la parenté qu’il y a entre l’injonction à la neutralité émise par le régime de croissance et une vision « analytique » pour laquelle ce sont les éléments qui précèdent le tout. Pensons par exemple à la différence entre « vie en société » et « vie sociale ». D’où l’intérêt que nous devons accorder aux travaux d’Harmut Rosa, pour ce qu’il appelle « une sociologie de la relation au monde », avec toutes les dimensions anthropologiques – « ou mieux, ontologiques » 12 – que cela implique. A condition de comprendre vraiment ce qu’il faut entendre par « relation » : « Une fois encore, la forme de la relation précède celle des entités reliées » 13. Appliqué à notre propos, la figure incarnée par le militant-chercheur précède – ontologiquement et épistémologiquement – celles du chercheur et du militant qui, du coup, apparaissent comme des abstractions de la figure originaire.
- Si on essaie de rassembler ce que vous venez d’avancer, alors le militant-chercheur est cet activiste qui se mobilise pour la continuation de la vie sociale comme milieu à condition que, quand il s’auto-comprend, il ne se définisse pas lui-même en additionnant les deux figures du chercheur et du militant.
Exactement, c’est pourquoi je distingue deux façons de penser l’hybridation. L’une par juxtaposition (avec 2 en amont, on fait 1 en aval), l’autre par médiation originaire (si il y a 2 en aval, c’est qu’au préalable il y a eu 1 en amont). Dans la première forme, nous trouverons le « chercheur-militant » : par son métier, il cherche ; en tant que citoyen, il a un engagement.
La seconde forme qui correspond au « militant-chercheur » est originaire parce que cela revient à voir dans la seule figure du chercheur ou de la seule figure du militant des « abstractions » de cette forme première. En caricaturant, je ne veux pas dire qu’un militant qui refuserait de juger et critiquer l’idéologie et les pratiques politiques dont il se revendique, tout comme un chercheur qui se retrancherait derrière un soi-disant devoir de neutralité politique pour éviter de prendre position ou de s’engager, n’existent pas : on en rencontre continuellement. Mais ils existent abstraitement. Ce qui est un paradoxe sinon une contradiction quand le même militant prétend s’investir dans une alternative « concrète » ou que le même scientifique prétend nous apprendre la vérité sur la « réalité ».
« Militant-chercheur » est ce que le philosophe Martin Buber (1878-1965) nomme un « mot-principe », c’est-à-dire un mot qui ne dit pas une chose mais un rapport, une relation. Je sais qu’il existe le très beau nom d’enquêteur – ce qui ferait directement référence et révérence à ce que John Dewey nomme « enquête » (inquiry) – mais on perdrait dans ce terme unique ce qu’un mot-principe dit : que ce qui est originaire, ce n’est pas l’unité, c’est la relation.
- Avant de conclure en évoquant les pratiques d’un tel militant-chercheur, que répondriez-vous à ceux qui ne manqueront pas de faire l’objection que ce que vous appelez « hybridation originaire » est en réalité une confusion, d’autant plus dangereuse qu’elle revient finalement à discréditer la science en la politisant et à encadrer la politique par la science ?
En fait, il faut plutôt se demander quels sont les présupposés qui empêchent de juger tout à fait légitime une hybridation originaire entre activisme et recherche.
Il y a tout d’abord ce que j’appelle un « régime épistémique de croissance » – défendant une neutralisation axiologique de la science, qui n’est qu’une déclinaison de la neutralisation éthique du monde par le régime de croissance – et qui consiste précisément à affirmer une démarcation infranchissable entre fait et valeur, entre être et devoir-être : il n’y aurait de vérité scientifique, d’objectivité, qu’à condition que le chercheur se plie inconditionnellement à un impératif de neutralité. Le régime épistémique de croissance serait ainsi corroboré par un récit standard positiviste selon lequel la science ne serait devenue moderne qu’à partir de ce partage entre subjectivité et objectivité. La confusion, dans ce cas, c’est celle entre la neutralité, qui est impossible (sauf pour les purs esprits désincarnés et solitaires) et l’impartialité, qui est indispensable et souhaitable.
Le plus surprenant, c’est qu’un tel récit standard est repris par un courant de pensée non pas pour le consolider mais au contraire pour le contester ; j’entends par là tout un courant contemporain néo-constructiviste – ou déconstructiviste – dont Bruno Latour et Philippe Descola sont en France des leaders médiatiques, et qui défend un relativisme si poussé qu’il ne peut que se contredire, suivant en cela le destin de tout extrémisme sceptique qui ne peut que finir par se retourner performativement contre lui-même.
Mais en réalité, la science moderne s’est rapidement comprise comme un constructivisme – d’abord pour se débarrasser de toute métaphysique –, se méfiant d’emblée de tout réalisme naïf et il n’est guère malaisé de trouver dans la littérature épistémologique les meilleurs arguments pour montrer que l’objectivité scientifique est une objectivité élaborée, menée par une rationalité ouverte : depuis E. Kant, Cl. Bernard et E. Duhem, jusqu’à G. Bachelard, K. Popper, A. Koyré, C-G Hempel…
- Pour le formuler en termes un peu plus savants, vous voulez dire que, sur le fond, la confusion vient de la thèse « séparatiste », et de ses variantes, selon laquelle la positivité des énoncés scientifiques serait radicalement séparée de toute normativité.
La réfutation d’une telle confusion peut se faire en plusieurs temps : tout d’abord, enregistrer que – dans la pratique – toute recherche scientifique se fait dans le cadre de normes épistémiques (non-contradiction, répétabilité, réfutabilité, simplicité…) et qu’un anarchisme méthodologique (Paul Feyerabend) est plus un appel salutaire à l’inventivité qu’un réel programme ; ensuite, montrer la porosité entre normes épistémiques et normes éthiques ; il suffit enfin de franchir la dernière frontière entre normes éthiques et normes politiques. Cette démarche ne pourrait être refusée que par un pur esprit totalement extrait – abstrait – de la vie sociale dont il provient pourtant, fût-ce déjà par son éducation scientifique. On l’attend toujours !
Bref, la politisation de la science est en vérité le cadre normal de toute recherche : l’important n’est pas de s’en étonner ou de prétendre y échapper mais de la reconnaître en tant que tel pour en faire un fondement constructif de toute démarche scientifiquement impartiale. De ce point de vue-là, la démarche récente de l’Université de Lausanne est remarquable 14.
- Si la démarche du militant-chercheur est ainsi (ontologiquement) légitimée, en quoi consiste-t-elle « concrètement » ? Car si vous renvoyez dos à dos tant le verticalisme descendant de la recherche classique que l’impératif d’horizontalisme de l’activisme alternatif, quel chemin reste-t-il ?
Bien sûr il faut commencer par se demander pourquoi rejeter tant le verticalisme descendant des discours académiques que l’horizontalisme militant : le premier à cause de cette condescendance du chercheur qui ne voit dans l’action qu’un champ d’étude, que du matériel pour témoigner de ses hypothèses ; le second parce qu’au mieux il se satisfait d’une vulgate idéologique, et au pire il défend un spontanéisme 15 dans lequel l’équivalence des opinions même les moins fondées permet d’écrêter la moindre érudition ou patience du concept.
Mais il reste un chemin, qui consiste à réhabiliter le travail conceptuel à partir des pratiques activistes, et c’est celui d’un verticalisme remontant.
Si le terme n’avait pas été galvaudé, je pourrais reprendre le terme de « dialectique » Mais à condition de ne pas se tromper de « synthèse ». Car il existe cette façon de croire que le moment de la synthèse consiste à remettre ensemble les éléments abstraitement séparés par l’analyse. Et là on perd tout le mouvement de la dialectique. La synthèse n’est pas l’addition de la thèse et de l’antithèse mais la position de ce qui était communément nié tant dans la thèse que dans l’antithèse.
- Euh…
La Petite politique consiste à invisibiliser tout débat de fond en mettant en avant des faux débats, dont l’opposition apparente ne sert en réalité qu’à faire passer sans discussion leur fond commun, et à blanchir ce fond qui justement est celui imposé par le régime de croissance.
Il y a ainsi – côté activisme – un faux débat qui consiste à se demander si la transformation du monde doit passer par le pour des alternatives ou par le contre des luttes. Combien de fois a-t-on entendu ces engagés décroissants qui après avoir écouté le discours des alternatives prétendent le rééquilibrer en lui reprochant d’avoir esquivé la question des luttes et des rapports de force ; et symétriquement, dans les milieux partidaires, que de prétention à l’originalité chez celui qui, pour contrer la désespérance des luttes, met en avant les espoirs portés par toutes ces révolutions qui déjà fleurissent de tous les côtés.
On se trouve alors dans un dialogue de sourds où chaque opposition joue sa partition sans jamais se demander ce que le spectacle de leur faux débat obère. Les uns fascinés par le réalisme de leur violence assumée contre le « monde d’avant » qu’ils rejettent, les autres obsédés par l’idéalisme du « monde d’après » qu’ils projettent : et tous, sans se rendre compte qu’ils escamotent la dimension théorique, conceptuelle, idéologique, de ce moment politique clef qui est le chemin entre le rejet et le projet : celui du trajet, de la transition, de cet intermédiaire qui part du monde rejeté pour s’élancer vers un monde projeté :
On va retrouver exactement le même schéma – côté savoir – où l’occupation du débat public par la Petite politique va escamoter le moment intermédiaire au profit d’une opposition caricaturale. Le moment Covid peut facilement illustrer cela. Très vite, passé le moment de sidération de la déferlante pandémique, ont surgi deux discours, en apparence totalement opposés, mais en réalité partageant un même fond de Petite politique. On a vu comment les tâtonnements normaux des premières mesures institutionnelles au lieu de profiter de l’occasion pour avouer que toute politique se fait avec « des essais et des erreurs » s’étaient parés de tous les parodies de dogmatisme, quitte à affirmer un jour ce qui sera infirmé le lendemain, mais toujours avec le même ton péremptoire du décisionnaire. On en a vu d’autres interpréter immédiatement les mesures de (principe de) précaution comme les révélateurs de la collusion liberticide entre Big Pharma (ou Big science) et Deep State : l’effondrement annoncé de l’économie n’étant que l’effet inéluctable de l’effondrement des barrières provoquées par les zoonoses. Comme si, à un moment où les savoirs auraient pu éclairer une démocratie sanitaire, on n’avait eu le choix qu’entre le dogmatisme descendant d’un conseil de sécurité sanitaire ou le scepticisme sans frein de la fabrique du soupçon.
C’est pourquoi, avec d’autres, j’avais proposé un texte défendant explicitement une position intermédiaire, où le confinement apparaissait en demi-résonance avec la décroissance 16.
- Le militant-chercheur apparaît donc comme un débusqueur des fausses alternatives qui renforcent les présupposés dominants, ceux du régime de croissance. Mais débusquer n’est pas suffisant. Comment repolitiser les discussions ? Pourquoi accorder alors tant d’importance au verticalisme remontant produit par le militant-chercheur ?
Parce que le militant-chercheur est celui qui cherche à résoudre des problèmes politiques rencontrés dans le milieu de son engagement. Comment ? En produisant du savoir engagé. Autrement dit, l’attention au réel qui porte l’engagement politique du militant-chercheur est premièrement une attention critique portée à la négativité du réel : c’est pourquoi un savoir remontant est une espèce d’apprentissage par essais et erreurs. Il n’y a aucune réticence à tirer les leçons des échecs mais pour cela il faut au préalable les reconnaître, ne pas jamais fuir les controverses, admettre que des déclinaisons de la décroissance peuvent provoquer des frottements et même des frictions, ne jamais hésiter à user de contrefactualité.
Mais deuxièmement, les problèmes une fois repérés, il faut assumer tout un travail de production de concepts, forgés à partir des frottements. Prioritairement, il y a là une création philosophique qui permet de réconcilier deux approches de la philosophie : comme production de concepts (Gilles Deleuze) et comme manière de vivre (Pierre Hadot). Le militant-chercheur est celui qui va élaborer non pas des opinions mais des concepts, des distinctions de concepts, des analogies, des images et des métaphores, des visions.
Pour cela, même si le terrain des expérimentations politiques est son tremplin, il ne lui est pas interdit de savoir faire la différence entre l’érudition et l’expertise. Il peut lire des « auteurs » – et même les citer (mais pas les réciter) – mais à condition que le débat savant soit toujours mis au service – sinon en servitude – du problème politique qu’il s’agit de résoudre, dans une perspective la plus « grande » possible.
Troisièmement, après avoir repéré, défini, le militant-chercheur a un devoir de transmission, d’échanges, de partages : c’est le moment de la discussion. Ça va être le test imparable pour voir jusqu’où la discussion va pouvoir remonter jusqu’aux causes. C’est là que les partisans de la Petite politique se démasqueront car ils appelleront très vite à cesser tout blabla pour passer au mieux à une simple politique des effets, celle dont la valeur majeur est l’efficacité.
- En fait, ce que vous nous avez proposé c’est un plaidoyer contre l’apolitisme – l’impolitisme – assourdissant et l’anti-intellectualisme muselant qui trouvent grand confort (ou grande paresse) à dresser une démarcation infranchissable entre activisme politique et recherche savante. A la fin de cet entretien, on voit bien comment vos réponses sont nées à la fois de pratiques militantes et de réflexions idéologiques et il est bien difficile de savoir faire la part entre ce qui vient des unes et des autres. J’espère que vous y voyez une force.
En tout cas, un compliment.
- …
C’est de l’ironie.
_____________________Les notes et références
- Le texte « Le futur triomphe mais nous n’avons pas d’avenir. Plateforme critique de la recherche scientifique », est rédigée à l’automne 2006 : https://sciences-critiques.fr/pourquoi-il-ne-faut-pas-sauver-la-recherche-scientifique/[↩]
- Jean-François Simonin (2018), Les tyrannies du court-terme. Quels futurs possibles à l’heure de l’anthropocène ?, Utopia.[↩]
- L’Atelier Paysan, Reprendre la terre aux machines. Manifeste pour une autonomie paysanne et alimentaire, Seuil, 2021.[↩]
- https://www.un.org/fr/observances/list-days-weeks. Le 21 mars, il sera débordé car il pourra militer pour de multiples « causes » : la forêt, le Novruz, la discrimination raciale, la poésie, la trisomie 21. S’il est féministe, iel trouvera tout au long de l’année de quoi s’indigner pour défendre : les droits des femmes, les femmes de sciences, les femmes juges, les femmes dans la diplomatie, les femmes rurales, les filles, les jeunes filles dans le secteur des TIC, l’élimination des violences faites aux femmes et aux filles. Sans oublier la journée du 19 novembre ![↩]
- Mark Hunyadi, La tyrannie des modes de vie. Sur le paradoxe moral de notre temps¸ Le bord de l’eau, 2015, pages 32-33.[↩]
- Pour une explication de cette notion de « dépassement » , et de dialectique : https://decroissances.ouvaton.org/2022/09/30/la-decroissance-au-dela-de-lanticapitalisme/#anbspSuppression_conservation_et_depassement[↩]
- Friedrich Hayek, Droit, législation et liberté, Tome 1, Règles et ordres, PUF, 1980, chapitre 2.[↩]
- Sur cette dimension d’attente, Mark Hunyadi reviendra dans Au début est la confiance, Le bord de l’eau, 2020. Car dans le mode de vie numérique, il est tellement plus commode de se confier à ses dispositifs.[↩]
- Mark Hunyadi, La tyrannie des modes de vie. Sur le paradoxe moral de notre temps¸ Le bord de l’eau, 2015, page 46.[↩]
- https://decroissances.ouvaton.org/2009/07/29/les-trois-pieds/[↩]
- Pour une exploration de cette différence entre spectateur et observateur, il faut aller jusqu’à intégrer les apports épistémiques de la mécanique quantique, et ne pas en rester à une mécanique classique ni même à une biomécanique : https://decroissances.ouvaton.org/2021/12/19/jai-lu-le-monde-quantique-et-la-conscience-dhenry-p-stapp/[↩]
- Harmut Rosa, Résonance. Une sociologie de la résonance au monde, La Découverte, 2018, page 451.[↩]
- Ibid. p.450[↩]
- Rapport du Groupe de travail sur la Recherche et l’engagement : L’engagement public des universitaires, Université de Lausanne, Mai 2022. https://www.unil.ch/centre-durabilite/fr/home/menuinst/recherche/recherche-et-engagement.html[↩]
- Spontanéisme des luttes et spontanéisme des alternatives même combat anti-intellectualiste : https://ladecroissance.xyz/2020/08/30/une-semaine-politique/#Lanti-intellectualisme_sous_la_forme_du_spontaneisme[↩]
- Avec plus de deux années de recul, il est toujours pertinent de relier la tribune que nous avions fait paraître dans Libération : https://www.liberation.fr/debats/2020/04/28/confinement-en-demi-resonance-avec-notre-decroissance_1786536/[↩]