Cela fait maintenant 2 années que j’essaie d’écrire à un rythme (presque) mensuel cette lettre du 12. J’ai beaucoup de retours encourageants et cela me permet de m’acharner à une réflexion en profondeur en faveur d’une décroissance qui sortirait enfin de son premier âge des généralités.
Bien sûr, il existe déjà un champ académique (et universitaire) consacré à la décroissance.
Bien sûr il existe aussi une nébuleuse d’engagements aussi bien individuels que collectifs qui ne sont pas rétifs à être caractérisés comme « décroissants ».
Mais l’écart entre ce champ (académique) et cette nébuleuse (activiste) me semble un gouffre. Dans lequel précisément peuvent s’engouffrer périodiquement tout une série de mouvements (des transition towns au mouvement slow, de la collapsologie aux 99%…) que je juge, pour l’écrire vite, idéologiquement tronqués. Or je crois que c’est à la décroissance de combler cet écart entre théorisation et activisme.
- Je viens de passer ces 2 derniers mois à participer à l’écriture collective d’un livre qui paraîtra dans la collection Idées reçues et propositions (aux éditions Utopia) d’ici 2-3 mois. Je crois que ce livre sera décisif pour la décroissance quant à son ambition d’oser poser une vision la plus ouverte et la plus cohérente possible du monde tel qu’il est et de celui que nous devrions désirer…
- Je vais consacrer les 2 prochains mois à l’écriture d’un livre, La décroissance politique qui analysera comment situer la décroissance par rapport à l’anticapitalisme, à l’écologie et au socialisme.
- Je pourrais alors revenir à mon plus ancien projet consacré à défendre que La décroissance est un humanisme.
En attendant, je vous propose quelques exercices (des expériences de pensée, d’imagination) de flânerie et de rêverie, comme méthodes pour tirer quelques fils décroissants, matières si on les tissait à envisager un tissu politiquement mobilisateur.
- exercice de contrefactualité : remonter le temps, choisir ce que vous jugez être un « tournant » (une « bifurcation ») de l’histoire et choisir l’autre voie que celle qui nous a amené à aujourd’hui. Quelles différences, quelles constantes ?
- exercice de la rétrospective du futur : avancer dans le temps de 100 ans, après la bifurcation qui aurait permis au monde de bien se réorienter (d’atterrir), et se raconter comment nos descendants pourraient raconter notre présent.
- exercice de la pelote : partir du monde d’aujourd’hui, changer juste un seul élément et tirer sur le fil. Par exemple : un monde dans lequel il n’y aurait plus de clé… Une société où toutes les « contributions » (fiscales) seraient payées en temps… Des transports en commun qui ne partent que si le véhicule est plein (des « taxis brousse », donc)… Une circulation sans permis de conduire…
Ces exercices peuvent se pratiquer en groupe, en solitaire : ce sont ce que Montaigne appelait des « essais« …