Quelques propositions de réponses argumentées aux critiques envers les Objecteurs de Croissance

L’argumentation complète de ces réponses réposent sur Les trois pieds politiques de l’objection de croissance.

1- Les Objecteurs de Croissance (OC) sont-ils de gauche ?

  • Historiquement, les O.C. le 11 septembre 1789 se seraient rangés à gauche du président de séance de l’Assemblée nationale pour refuser d’accorder au roi un droit de veto absolu sur les lois.
  • Economiquement et socialement, nous nous posons les mêmes problèmes que ceux que la gauche devrait se poser. Et comme nous considérons que la politique est le lieu où nous devrions décider ensemble nos décisions, nous défendons un volontarisme politique ; par exemple, les injustices sociales ne sont pas « naturelles » et par conséquent la justice sociale n’est pas naturelle mais artificielle (ex. de l’héritage)
  • Mais nous ne sommes plus dans le même paradigme que « La Gauche » : à cause de notre antiproductivisme, de notre antilibéralisme (même si nous pouvons distinguer entre un libéralisme philosophique et un libéralisme idéologique), de notre anti-utilitarisme (nous ne réduisons pas l’intérêt à l’intérêt économique)
  • Le philosophe Alain raconte au début du XXe siècle que s’il rencontre quelqu’un qui « ne fait pas de politique » alors il ne peut s’empêcher de penser : « voilà quelqu’un qui n’est pas de gauche ». Eh bien, les O.C. font de la politique et chacun peut en déduire : « voilà des gens qui ne sont pas de droite ! »

2- Les O.C. mettent-ils clairement en évidence les mécanismes politiques et économiques qui ont abouti à la situation actuelle ?

  • Dans « la situation actuelle », attention d’abord à ne pas confondre ce qui est de l’ordre du capitalisme et de ce qui est de l’ordre d’une « phase du capitalisme ». A confondre les deux, on risque de confondre la crise du capitalisme avec la crise d’une phase du capitalisme. Et du coup, on risque de se réjouir trop vite de la crise actuelle de la phase néo-libérale en la prenant pour la phase finale du capitalisme.
  • Ne serait-il pas plus judicieux et réaliste de faire l’hypothèse que 2009 est juste le passage du capitalisme néo-libéral au capitalisme vert ? La fin du capitalisme néo-libéral n’est pas la fin du capitalisme, loin s’en faut !
  • Quant aux mécanismes politiques et économiques qui ont abouti à la crise actuelle du néo-libéralisme, les O.C. n’ont aucun mal à proposer des pistes d’explications. Celle qui irait peut-être le plus au fond des choses serait celle qui signale que la crise actuelle, crise de l’endettement, résulte d’une contradiction interne : à savoir que les travailleurs sont en même temps des consommateurs (sont ainsi intimement liés la société de consommation avec la valeur-travail) Or le néolibéralisme en faisant toujours croître la part des revenus du Capital aux dépens de ceux du Travail ne peut faire croître en même temps la consommation qu’au moyen du Crédit… On connaît la suite !
  • Quant à la liaison historique qui relie les mécanismes politiques et les mécanismes économiques pour aboutir à la situation actuelle, les O.C. non seulement n’ignorent pas la complémentarité de l’Etat et du Marché dans la formation des Nations au XIXe siècle, mais nous en tirons une conséquence fondamentale dans notre « stratégie de la transformation » : croire que la prise préalable du pouvoir d’Etat rendra possible l’émancipation économique est une illusion qu’il faut cesser de propager si les erreurs du « socialisme réel » et de la « social-démocratie » ne doivent plus être répétées.

3- L’opposition croissance/décroissance est-elle un raccourci simplificateur ?

  • Dans un premier temps, ne faut-il pas assumer cette « simplification » ? Oui, les O.C. désirent s’émanciper des illusions et des aliénations de la religion de la Croissance. Manière de ne pas distinguer entre économie, écologie, social, politique, humain : car, il serait bien « abstrait » de laisser croire que l’imaginaire de la croissance qui serait à dénoncer en économie devrait être ménagé et développé dès qu’il s’agirait du social. Concrètement, le « paradigme de la décroissance » ne peut pas être découpé en tranches.
  • Maintenant la « simplification » résulte trop souvent d’une caricature : en dénonçant une croissance infinie, les O.C. ne s’apercevraient pas qu’ils risquent de prôner une décroissance vers le zéro. Pour les O.C., la décroissance c’est d’abord la décroissance des inégalités socio-économiques et de l’empreinte écologique. Or sur ces deux points, il faut une certaine mauvaise foi pour laisser croire que les O.C. seraient des « bisounours » qui rêveraient d’une société à l’empreinte écologique nulle et aux inégalités (économiques, sociales, culturelles) nulles. Une telle société serait une société sans humains. Les O.C. ne sont pas coupés du principe de réalité.
  • Par delà ces simplifications, il n’empêche que la Décroissance peut bien apparaître aujourd’hui comme ce spectre qui va hanter le XIXe siècle. Autrement dit, si l’on veut conserver un sens au projet politique de « décoloniser notre imaginaire », il faut oser assumer la transformation radicale du projet politique de l’objection de croissance.

4- Les O.C. se préoccupent-ils assez de la question sociale ?

  • Si « se préoccuper assez de la question sociale » c’est ne se préoccuper que de la question sociale, alors les O.C. acceptent ce reproche. Mais dans ce cas, que cette réponse nous donne droit à poser sans tarder d’autres questions ; que ceux qui nous font ce reproche se demandent s’ils se préoccupent assez de la question écologique, de la question démocratique, de la question anthropologique. Et quand ils répondront en liant toutes ces questions, nous serons ravis de constater que nous pouvions éviter de nous faire de tels mauvais reproches.
  • D’autant que la question sociale est au cœur de nos propositions ; ainsi nous ne nous contentons pas de demander un revenu inconditionnel de vie, nous l’associons sans hésiter à un revenu maximum.
  • D’autant que l’effet de masse critique résulte de la conjugaison des forces des initiatives concrètes et des contre-pouvoirs dans les luttes sociales.
  • Encore un exemple, celui de la gratuité : on peut caricaturer et sous-entendre qu’une telle proposition prouve juste la crasse ignorance des O.C. quant aux dimensions sociales et économiques d’une telle revendication. Mais les O.C. n’ignorent pas que la gratuité (en aval, pour l’usager) a un coût « en amont ». Et que cette « gratuité » résulte bien d’une « collecte » quand elle consiste en une gratuité monétaire (ce qui ne veut pas dire que nous confondons toutes les fonctions de la monnaie : pour évaluer, pour échanger, pour capitaliser). Mais cette gratuité peut d’abord être un droit d’usage gratuit, c’est à dire une mise à disposition gratuite de biens premiers à condition que leur usage soit une condition de l’émancipation (par exemple, un droit souverain à disposer d’une terre pour la cultiver, à condition d’en faire un « bon usage »).

5- La stratégie du « mot-obus » conduit-elle à l’isolement ?

  • Le présupposé de cette critique c’est d’installer la question politique dans la stricte alternative de l’isolement ou de l’Unité. Or la stratégie de l’Unité est une stratégie électoraliste dont les O.C. veulent à tout prix se méfier. Faire de la politique ; oui. Aller aux élections ; oui pour l’amont du processus électoral. Juger du succès d’une élection au seul critère de la victoire électorale : certainement pas…
  • L’image de l’obus est certes guerrière ; a minima provocatrice. Occasion alors de rappeler au préalable notre pacifisme radical. Occasion ensuite de signaler que cet « obus » a pour fonction de s’en prendre à une forteresse. Occasion enfin d’accepter que cette forteresse ne pourra jamais « récupérer » la décroissance…

6- Comment finalement la stratégie de la transformation résout-elle les trois problèmes politiques fondamentaux ?

  • Le sujet de la sortie (Qui ?) : l’effet de masse critique.
  • Le rythme de la sortie (Quand et où ?) : le renversement des stratégies historiques de la Gauche permet à l’Utopie de commencer sans attendre (sin esperar).
  • La méthode de la sortie (Comment ?) : la radicalité comme cohérence des trois pieds, plutôt que comme intransigeance.

7- Les O.C. sont-ils à l’aise dans chacun des trois pieds ?

  • Ne nous cachons pas que non. La force des O.C. ce sont leurs idées et leurs initiatives alternatives pour commencer sans attendre la sortie du capitalisme : le pied des expériences et celui du projet.
  • Faut-il pour autant abandonner le pied des manifestations publiques ? Non, parce qu’il est le pied de la visibilité et des débats. Et surtout n’oublions pas que l’une des ambitions des O.C. est la repolitisation non seulement de l’écologie et de l’économie mais aussi de la politique elle-même ; or, lors des élections européennes de 2009, nombreux furent ceux qui virent dans la présence de la décroissance dans le débat électoral une belle occasion de revenir à la politique (potentiellement des déçus de la politique, de la Gauche et bientôt de l’autre gauche).
  • Reprocher aux O.C. de se compromettre dans les élections, c’est finalement ne pas avoir compris la « stratégie de la transformation ». Seuls ceux qui en sont encore à croire que toute stratégie de sortie du capitalisme ne peut pas ne pas passer par la conquête préalable du pouvoir avant de changer la société peuvent nous adresser un tel reproche (d’aller aux élections pour aller à la conquête du pouvoir). C’est pourquoi, au sein de notre stratégie, nous voulons d’abord changer la société, sans attendre un pouvoir (d’Etat) dont la possession au sein d’une majorité serait contre-productive.

8- Les O.C. sont-ils des écologistes benêts ?

  • Très bien de ne pas être un « écologiste benêt » ; mais encore faudrait-il être un « écologiste ». Car sinon, cela donne à entendre que tous les écologistes seraient des « benêts ». D’autant que s’il est nécessaire d’être « écologiste », cela ne signifie pas que c’est suffisant : évidemment !
  • Pour ne pas être un « écologiste benêt », alors il faut avoir l’audace d’être un « écologiste radical », c’est-à-dire oser aller « au fond des choses ». Plutôt être cohérent qu’intransigeant.
  • Le « fond des choses », c’est la question du pouvoir. Plus exactement, sa concentration aux mains des élites (finance, politique, média, industrie). A la source de cette concentration, on trouve l’instauration du « système » de l’économie de marché – avec l’économie de croissance qui en est résultée – et l’introduction parallèle de la « démocratie » représentative.
  • Faire de la conquête du pouvoir un préalable du changement de la société, c’est répéter les mêmes erreurs historiques du « socialisme réel » et de la « social-démocratie ». Après les « déçus de la gauche », les futurs « déçus de l’Autre gauche » ? Peut-on faire autrement ? Peut-on changer la société sans prise préalable de pouvoir (de l’Etat, dans les régions, etc.) ?
  • C’est pourquoi les O.C. proposent une « véritable stratégie de transformation », c’est-à-dire une critique cohérente et anti-systémique du capitalisme, en combinant les expériences des alternatives concrètes et des contre-pouvoirs dans les luttes sociales avec un projet de société, sans dédaigner la visibilité électorale : bref, de quoi commencer sans attendre non pas seulement une « contre-offensive » mais une sortie définitive du capitalisme.

9- Les O.C. valorisent-ils excessivement les communautés traditionnelles du passé ?

  • Certes, les O.C. n’ont pas le culte de la mode et de la modernité. Le nouveau n’a pas toujours raison. Mais il n’a pas toujours tort. Et c’est bien pourquoi les O.C. veulent avoir un rapport entier au temps ; il ne s’agit plus de répéter une querelle politique des anciens et des modernes, en opposant un passé ringard et folklorique à un avenir radieux et prometteur. Il s’agit tout au contraire de sortir de cette direction linéaire et dirigée du temps à l’image d’une ligne droite. Si les uto-pistes doivent commencer sans attendre, alors plus question de croire en un déterminisme matérialiste de l’Histoire. Est-ce là être « réactionnaire » parce que les O.C. se sont émancipés de l’aliénation du mythe du Progrès ?
  • C’est dire que les O.C. veulent imaginer une « politique des possibles » : « d’autres mondes sont possibles ». Et dans ces possibles, sans aucune nostalgie d’un retour à la préhistoire, pourquoi la politique devrait-elle s’obliger à ignorer les héritages des autres formes de vie et d’organisation politique ? Pour penser le pouvoir, pourquoi se contenter de commencer avec Machiavel et se priver de méditer sur toutes les recherches d’anthropologie politique ? Savoir que dans des tribus indiennes, il n’y pas de mot pour « chef » pour nous permettre de défétichiser le culte européo-centré pour le pouvoir.
  • D’autant que ces « communautés traditionnelles du passé » nous apprennent qu’un autre rapport à la Nature est possible ; et cet autre rapport à la Nature est aussi un autre rapport à la Technique, à la Culture, à l’Humain…

10- Les O.C. réduisent-ils la politique à un repli sur des comportements individuels ?

  • Cette critique revient à traiter les O.C. d’individualistes libéraux qui s’ignorent. Comme si les O.C. misaient tout sur les individus en pensant que les comportements individuels permettront de construire une société humaine et juste.
  • L’habileté de cette critique, c’est d’essayer de réduire le débat – celui qui porte sur la transition – aux termes de individu/société/Etat ; et d’en déduire que si les initiatives individuelles ne peuvent pas réussir à changer la société alors c’est à l’Etat qu’il faut confier ce rôle historique. Les O.C. acceptent la prémisse : les initiatives individuelles peuvent être plus dépolitisantes que repolitisantes. Et pourtant, nous n’en acceptons pas la conclusion : pourquoi ? Parce que nous ne voulons plus entretenir l’illusion que la prise préalable du pouvoir (surtout celui de l’Etat, car il n’en va peut-être pas de même pour la prise de pouvoir au niveau municipal…) est la condition nécessaire de la transformation de la société.
  • Et c’est pourquoi, sans attendre, les uto-pistes des alternatives concrètes commencent d’autres mondes possibles. Ces commencements sont particulièrement importants parce qu’ils ne sont pas des initiatives individuelles mais toujours des projets collectifs et associatifs. C’est aussi en ce sens que les O.C. sont résolument des anti-libéraux.
  • Quiconque s’est déjà impliqué dans les alternatives concrètes et les expériences de contre-pouvoirs a eu la possibilité et la chance de découvrir que le trajet de l’émancipation n’était pas linéairement individuel puis collectif puis politique mais qu’il était beaucoup plus simple et mobilisateur de commencer par s’engager au niveau collectif. Et c’est en pratiquant, que l’exigence de cohérence offre à chacun les possibilités d’approfondir son engagement au niveau individuel et/ou de l’élargir au niveau politique.

11- La simplicité volontaire comme choix de vie délibéré est-elle réservée à une très petite minorité ?

  • Les O.C. n’ignorent pas que l’idéologie dominante est toujours celle de la classe dominante. Mais pour autant, ils ne veulent pas endosser l’habit de l’avant-garde éclairée qui guidera les majorités aliénées.
  • A la différence des stratégies traditionnelles de la Gauche, les O.C. veulent marquer une rupture pédagogique : ils ne s’agit plus d’éclairer pour mieux faire ; il s’agit de faire pour (s’)expliquer et comprendre.
  • Ce qui ne signifie pas un rejet du Projet et de la Théorie (encore une de ces alternatives que les O.C. veulent rompre, comme si on n’avait le choix qu’entre la prise de conscience individuelle et l’enseignement vertical et descendant par ceux qui savent). Certains O.C. d’ailleurs ne sont pas exempts, sur ce point, de manque d’autocritique : car ils ne rejettent l’Ecole que pour mieux imposer leur égocentrisme !
  • Apprendre à ce décentrer, de soi comme de l’Autorité (du Parti, du Père…), c’est effectivement tout un programme plus politique que psychologique !
  • Quant à la simplicité volontaire, c’est la caricaturer que de la réduire à un repli individualiste. Car cette simplicité volontaire n’est pas une invention moderne, mais seulement la sagesse dont savaient faire preuve les anciens qui vivaient et respectaient leur appartenance à une communauté : par exemple, ce que George Orwell nomme la « décence ordinaire » n’est vraiment pas un individualisme « bobo » ou « baba » !

12- Les O.C., faute de sens pratique, oublient-ils la modélisation et les expérimentations ?

  • Si le « sens pratique », c’est la compréhension réfléchie de la pratique, c’est-à-dire la théorie à partir de la pratique, alors ce reproche, en plus d’être injuste, est d’abord une preuve d’ignorance de ce que proposent et vivent les O.C. !
  • Car précisément, c’est bien par les expériences et les pratiques que les O.C. s’engagent en politique ; par le « pied des expériences ».
  • Maintenant, si ce reproche signifie que les O.C. sont des uto-pisteurs qui ne peuvent pas décrire à l’avance une société idéale valable pour tous et pour toujours alors les O.C. revendiquent cet absence de sens pratique ! Nous connaissons (parce que nous y vivons) la société que nous rejetons ; nous commençons à être au clair sur trajet pour en sortir ; pour la suite, oui pour l’ouverture des expériences et des discussions…

13- Pourquoi les O.C. préfèrent-ils railler l’Unitude que s’y rallier ?

  • Parce qu’elle n’est qu’une tactique électorale et que les O.C. même aux élections adoptent une visibilité non électoraliste ; parce qu’elle fait passer les tactiques de la politique (la conquête du pouvoir) avant la stratégie du politique (la sortie du capitalisme).
  • Parce qu’une victoire de l’autre gauche ne ferait que reprendre les deux étapes que la Gauche historique a toujours empruntées : la conquête du pouvoir pour changer la société.… On ne peut attendre et craindre de cette énième tentative que de nouveaux déçus : après ceux de La Gauche, ceux de l’Autre Gauche ?
  • Parce que notre « stratégie de la transformation » rompt avec la recherche du minimum dénominateur commun : et que nous préférons « chaîne d’équivalence », « principe d’horizon », « ampliation analogique »…

14- Que peuvent attendre les O.C. d’un Manifeste ?

  • Certainement pas qu’il annonce de façon prophétique l’avenir et la ligne à suivre.
  • Que ce Manifeste prenne garde à ne retomber dans aucune des illusions déconstruites par notre stratégie de la transformation.
  • Qu’il suscite le désir de repolitiser la politique…

15- Pourquoi tant de méfiance pour « l’argument de la nécessité » ?

  • L’argument de la nécessité – la décroissance est nécessaire, inévitable – est le même que celui de l’impossibilité : une croissance infinie dans un monde fini est impossible.
  • Car une croissance sans fin des inégalités est malheureusement possible dans un monde fini. Les O.C. ne critiquent pas la croissance pour son impossibilité mais pour son absurdité : ils posent ainsi en politique la « question du sens ». Les O.C. ne sont pas décroissants « faute de mieux », ou parce que ce serait « le moindre mal ». Même si les ressources naturelles étaient infinies, les O.C.feraient objection de conscience à la croissance économique.
  • Parce que la « nécessité » est le contraire de la « liberté ». Et qu’il doit être contradictoire d’utiliser en même temps la nécessité comme moyen et la liberté comme but.
  • Parce que, dans la tradition socialiste (sous la forme du déterminisme du matérialisme historique), il a souvent servi de justification à l’usage de la violence.
  • Parce que, dans ce qui se constitue comme tradition écologiste (sous la forme de l’impossibilité d’une croissance infinie), il peut aussi servir à un même usage autoritaire, voire totalitaire.
  • Parce que ce risque menace, me semble-t-il, les deux travaux les plus proches de notre stratégie : le texte d’André Gorz dans l’Avant-propos du Manifeste d’Utopia et le Manifeste pour une alternative de Patrick Mignard. « La sortie du capitalisme a déjà commencé » écrit André Gorz ; et pour Patrick Mignard : « Toutes les civilisations ont cru en l’éternité de leur existence. Toutes ont disparu. Le système marchand, à l’image de ses prédécesseurs, croit lui aussi en la « rationalité » de son fonctionnement et en l’éternité de sa domination. Lui aussi disparaîtra pourtant dans les affres de ses contradictions poussées à leur paroxysme. » Et pour éviter ce « risque », ils ajoutent le même argument : tant qu’à faire, autant choisir une alternative que subir un « socialisme de guerre » ou un « écofascisme ». Certes, mais ne faudrait-il pas aussi se demander si le refus d’accompagner le capitalisme ne doit pas être aussi un refus d’accompagner la sortie (inéluctable ou nécessaire) du capitalisme ?
  • Parce qu’il empêche de se demander vraiment pourquoi nous critiquons le capitalisme ? Même si le capitalisme était une réussite du point de vue de ses propres critères (économiques principalement), il faudrait le critiquer. Nous ne critiquons pas le mode de vie d’un capitaliste qui a réussi simplement parce qu’il ne règle pas lui-même la facture réelle de sa réussite (il traite le reste des humains et la nature comme des externalités), nous critiquons ce mode de vie en tant que tel.

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