Comment imaginer la vie quotidienne après la décroissance

Ce que j’avais préparé pour mon intervention le mercredi 17 février 2016 à Challans (85), pour répondre à la question : la décroissance comme projet rêvolutionnaire. Je développe plus le côté « rêve » que le côté « révolutionnaire ». Mais l’important est de se rappeler que ces possibleS sont seulement contingentS et ne justifient aucune nécessité → pas question de se prendre pour une avant-garde éclairée. Pour éviter cela, j’avais articulé cette conférence avec une autre : « Les décroissants sont-ils conservateurs ? « . Pour la question de la transition, je me permets de renvoyer à mon Politique(s) de la décroissance, publié en 2013.

A- Pour un premier survol, présenter la décroissance comme projet rêvolutionnaire peut sembler doublement égarant :

1. La révolution ne fait plus rêver grand monde

  • D’abord parce que les « grandes » révolutions politiques ont toutes, en échouant, renforcer toutes les systèmes qu’elles avaient prétendu détruire.
  • Ensuite, parce que s’il existe aujourd’hui une révolution qui réussit, c’est bien celle de la révolution technique permanente et si l’on a admis qu’entre technique et société, technicité et socialité il y a a minima un hiatus alors la victoire permanente de la technique doit signifier la défaite permanente de la sociabilité.

2. La décroissance n’est pas un projet

  • Il n’y a de projet de société que pour une… société or la décroissance ne fait pas une société : tout aussi absurde qu’une société avec une croissance vers l’infini, serait une société avec une descente vers 0 → de même que la croissance ne devrait jamais permettre au PIB de dépasser le plafond d’une empreinte écologique (EE) soutenable, jamais la décroissance ne devrait repasser sous le plancher d’une vie décente. D’une façon générale, la décroissance espère une société qui saura se situer dans cet espace écologique (entre plancher de la vie bonne dans une Cité juste et plafond de la soutenabilité écologique).
  • La décroissance est un trajet, une parenthèse entre 2 grandes phases historiques : celle de la croissance – que nous rejetons – et celle d’un monde sans croissance → que l’on peut appeler « a-croissance » ou « économie de l’état stationnaire ».
  • Pour comprendre cette idée de la décroissance comme transition, intermédiaire, trajet, parenthèse, il faut faire une analogie avec la division marxiste de l’histoire : capitalisme/socialisme/communisme. Ce qui donne croissance/décroissance/a-croissance et ce qui signifie :

1. En tant que transition, la décroissance, comme le socialisme, ne disparaîtra qu’avec l’objet de sa critique 1 : or sa critique de l’économie est systémique → c’est non seulement la religion d’une société encastrée dans l’économie que nous rejetons mais ce rejet se manifeste à tous les maillons de la chaîne économique : de l’extraction aux déchets en passant par la production et la distribution des richesses comme par la consommation.

2. Le socialisme dont hérite la décroissance n’est pas le socialisme scientiste de Marx, Engels ou Lénine mais celui des socialistes utopiques, celui des expérimentations minoritaires (entre le citoyen et la nation, il faut intercaler le monde des associations, des coopératives, des mutuelles).

3. En particulier, les décroissants rompent avec toute vision scientifique de l’histoire comme histoire d’une nécessité économique ; au profit d’une vision buissonnante et eSpérimentale de l’histoire comme règne de la contingence → comment alors prétendre proposer des éléments pour un « projet » ?

Nous pouvons pourtant faire un bilan positif de ce premier survol :

  • Les décroissants ne sont pas des fanatiques aveugles de la technique : non, nous ne croyons pas que la technique du futur réglera demain les problèmes hérités de notre présent. Nous ne voulons plus penser la technique à partir du seul modèle de la « fabrication » → à condition de ne pas « diviniser » la nature (la wilderness), il n’est pas irresponsable d’envisager de « piloter » la nature.
  • Les décroissants font le pari que nous pouvons avancer vers des sociétés qui retrouvent davantage de socialité qu’aujourd’hui (sortir de la dissociété où les individus ne se juxtaposent plus qu’avec ceux qui vivent comme eux, qui leur ressemblent) ; et en avançant « ensemble », nous faisons le pari d’une réappropriation citoyenne de la politique.
  • Les décroissants se rendent bien compte que sous la modestie de leur « transition », de leur « parenthèse », c’est une rupture radicale avec toute l’économie et son monde qu’il faut envisager. Ce que Serge Latouche vise sous le nom de « décolonisation de notre imaginaire » et que les zadistes pointent dans leur expression : l’aéroport « et son monde ».
  • Les décroissants cadrent leurs analyses et propositions politiques à l’intérieur de limites, à l’intérieur d’un cadre : le cadre de l’espace écologique = il nous faut penser systémiquement en termes de plancher et de plafond. Nous ne placerons pas ainsi l’écologie au cœur de la politique mais nous ferons exactement l’inverse : replacer la politique au cœur de l’écologie, comme replacer l’Humanité au cœur de la Nature (et c’est bien par analogie avec une vision buissonnante de l’Evolution naturelle que nous pensons aujourd’hui une vision buissonnante de l’Histoire).
  • L’une des sources des décroissants est bien le socialisme, mais le socialisme utopique. Oui nous rejetons le capitalisme. Mais plus radicalement, nous rejetons le productivisme qui est à la racine du capitalisme → du même coup, nous rejetons aussi le productivisme qui est aussi à la racine de beaucoup d’anticapitalismes. Pire, comme nous faisons l’hypothèse qu’à la racine du productivisme il y a une vision qui voit la Nature comme un Objet tout juste bon à fournir des « ressources » à l’Homme pensé comme Sujet et Individu, nous allons jusqu’à étendre notre critique de « l’économie et de son monde » jusqu’à l’individualisme (nous allons dire pourquoi).
  • Cette source politique de la décroissance, à la fois socialiste et utopique, nous conduit à faire de la politique d’une drôle de façon : nous nous investissons individuellement et collectivement « sans attendre » dans des alternatives : amap, monnaie locale, coopérative d’habitat, de l’énergie, d’autres façons de produire, de consommer, de se transporter, de se soigner, de s’alimenter, de s’amuser…

Transition : cet aspect « concret » de la décroissance est pourtant source de difficultés politiques qu’il faut maintenant évoquer :

  1. D’une part, est-il si évident que ce que nous appelons alternatives « concrètes » soient si concrètes que cela ? En effet, le concret, c’est ce qui s’oppose à l’abstrait. Or abstraire, c’est extraire, c’est faire abstraction de, c’est se séparer, c’est s’isoler. Or certains évoquent ces alternatives concrètes comme des « oasis » : mais autour d’une oasis domine le désert. Se replier dans l’oasis d’une alternative concrète, n’est-ce pas au sens propre « déserter » ? Comment ne pas constater le hiatus entre motivation dans l’entre-soi des alternatives et démobilisation politique dès qu’il s’agit de passer à l’activisme politique ? Comment espérer guérir si on ne s’occupe que de soigner des symptômes ?
  2. D’autre part, il faut bien reconnaître du côté de l’amont, tant au plan politique des moyens réels de changer de paradigme qu’au plan théorique des idées, la faiblesse de l’aide que nous pourrions recevoir. Dans un monde où le travail est source de violences, du burn-out au bore-out, aucun homme politique n’ose pourtant annoncer que cela fait longtemps que le chômage n’est pas un problème et cela pour une très simple raison : il est la solution dont les dominants ont besoin pour s’enrichir sans limite (même les socialistes actuels ne cherchent plus qu’à nous convaincre que les inégalités sont justifiées au lieu de tout faire pour les réduire).

De tels constats, nous pourrions en faire au kilomètre (il suffirait de faire l’inventaire des documentaires et autres reportages pendant rien qu’une semaine de télévision). Le « constat de ces constats », c’est que chacun peut constater que ces constats ne créent aucune dynamique : chacun a de plus en plus conscience que le monde dans lequel nous vivons est une dystopie en acte mais cette prise de conscience provoque un effet de sidération et d’immobilisation.

Nous faisons alors l’hypothèse que ce n’est pas de la réalité, des constats qu’il faut partir mais de l’idéal, de l’idéologie, des rêves, de la pensée.

B- La décroissance est une philosophie politique → c’est pourquoi elle défend des « valeurs »

Voilà pourquoi il nous semble pertinent de présenter la décroissance comme une « philosophie politique ».

Là encore, nous nous rendons bien compte que nous nous exposons immédiatement à la facilité des critiques démagogiques : le refus de la politique et le refus des intellos. Néanmoins, continuons.

Parce que la philosophie, pas simplement depuis la Grèce antique mais aussi dans toutes les autres cultures, est d’abord une manière de vivre avant d’être une activité rhétorique de mise en cohérence des concepts.

Parce que l’objet de la politique est la discussion commune sur le vivre ensemble : il ne s’agit pas simplement de bien vivre mais de bien vivre dans une Cité socialement juste et écologiquement responsable.

Parce que la réappropriation citoyenne de nos vies par nos usages commence par la question du sens, du sens de la vie, de notre vie, de la vie de chacun, de la vie en tant que telle.

1. Individuellement, la vie humaine n’a pas de sens

Nouveau paradoxe, nouvel exemple de décolonisation de l’imaginaire : rompre avec les illusions qui dans les Temps modernes portent sur le statut de l’individu (philosophiquement, du Sujet).

  • La promesse des temps modernes d’un Sujet comme auteur souverain de ses pensées, de ses paroles et de ses actes n’a pas été tenu (parce qu’elle était intenable) : l’individu aujourd’hui est un individu désorienté, dans le décal-âge permanent → parce que l’âge canonique n’est plus le vieux, l’adulte ou même le jeune mais l’ado, cette période intermédiaire inventée récemment pour assumer l’abolition des rites de passages entre les âges de la vie. Quand il faudrait se demander de quoi l’ado peut-il être le sujet (de son corps, de ses choix, de ses efforts ?), chacun aujourd’hui semble juste hésiter entre la nostalgie enfantine de « l’illusion de la toute puissance » (Donald Winnicott) 2 et « l’identité négative » propre à l’adolescence 3. Comme il ne sait plus se faire des amis, alors il s’invente des ennemis.
  • Pour les décroissants au contraire, il y a une vérité anthropologique : c’est une illusion « que de vouloir trouver individuellement du sens à la vie » 4. Or cette illusion est précisément au cœur du capitalisme : comme si la découverte du sens de la vie était l’affaire de l’individu isolé. « Le postulat est que chaque individu a le droit de monopoliser toutes les ressources nécessaires à cette fin. Au niveau de la société, cela se traduit par une exigence non négociable de croissance : seule la croissance peut satisfaire les exigences de tous ces individus ne devant pas être limités » 5.

Pendant que l’individu post-moderne s’égare ainsi, la sphère politique, celle où le sens est socialement construit, est écartée, méprisée → la décroissance est décroissance de la dépolitisation.

2. Comment alors trouver du sens ?

→ A partir du réel, à partir de ce que nous rejetons, à partir de nos résistances 6.

En effet, au cœur des résistances, ne peut-on pas dénicher l’espoir que d’autres mondes sont possibles ? Celui qui critique explicitement une société de l’accélération où tout gain de temps est aussitôt gaspillé dans une nouvelle activité encore plus chronophage (le temps perdu dans les embouteillages pour profiter de ses RTT) ne suggère-t-il pas implicitement que dans une société idéale, de ses rêves, il faudrait plutôt viser le ralentissement ? Celui qui s’indigne d’une société du mépris et de l’humiliation le fait par une expérience morale concrète qui laisse à entendre une référence implicite à une autre norme, précisément celle de la dignité.

Dans les résistances sociales, on peut donc trouver les fondements objectifs d’un intérêt pour l’émancipation.

Les luttes « contre » comme les expérimentations « pour et avec » fournissent donc les bases réelles pour formuler des revendications positives en faveur d’un monde idéal :

  • Une lutte contre un management inhumain ou une délocalisation peut ainsi être lue comme une revendication implicite d’une organisation coopérative ou autogestionnaire de la production
  • Chacune des luttes et des expérimentations minoritaires ne trouvent vraiment leur sens que dans la réappropriation de ce questionnement par les acteurs eux-mêmes : manière citoyenne de se réapproprier le sens de sa vie.

→ Une telle « transcendance intramondaine » des résistances fournirait le fondement pour dire ce que nous trouverions juste. Mais le « sens », ce n’est pas seulement le « juste », c’est aussi le « désirable ».

Quel place pourrait trouver le désir dans une société libérée de la croissance alors que le désir semble au contraire le moteur principal d’une société de croissance ? N’est-ce pas garder le loup dans la bergerie que de vouloir continuer à faire place au désir ?

  • Quand en 1651, dans Le Léviathan, le philosophe Thomas Hobbes en vient à proposer le Léviathan comme modèle de régime politique autoritaire où chacun est prêt à sacrifier une large part de sa liberté en échange de la sûreté, il a commencé par résoudre une énigme anthropologique : mais d’où peut bien venir le désir du pouvoir ? Le pouvoir est éminemment désirable non pas parce qu’il serait le désir suprême mais parce qu’il est « au premier rang » : avoir du pouvoir, c’est avoir les moyens de satisfaire tous les autres désirs.
  • A contrario, les décroissants doivent imaginer les moyens démocratiques de limiter un tel désir du pouvoir (en particulier, le pouvoir d’achat).

C’est pourquoi :

  • A contrario d’une croissance sans limite du pouvoir d’achat et donc de la richesse, les décroissants plaident pour une sobriété volontaire, pour une pauvreté sereine qui s’épanouirait entre le plancher de la misère (quand on manque du nécessaire) et le plafond de la richesse (quand le superflu prétend être un besoin).
  • Plus positivement, le désir qui est désirable pour les décroissants devrait se situer au-dessus de la souffrance du manque et en dessous des affres de l’insatiable : entre la faim et la gourmandise, il y a l’appétit. Les décroissants devraient plaider pour des modes de vie où le sentiment d’exister trouve à s’éprouver dans l’appétit de vivre. Manger avec appétit, c’est savoir apprécier des nourritures simples, naturelles, ordinaires, avec convivialité. La tristesse d’exister comme manque d’appétit.

3. La question des valeurs

Dans la nébuleuse décroissante, des travaux récents nous fournissent plusieurs pistes pour inventorier explicitement les valeurs autour desquelles nous désirerions vivre ensemble.

  1. Jean-Claude Michéa dans ses lectures et ses interprétations de George Orwell regroupe de telles valeurs sous le nom de « décence ordinaire » (common decency) : le sens de « ce qui ne se fait pas » est pour George Orwell comme une éthique innée propre à la condition ouvrière : la loyauté, l’absence de calcul, la générosité, la haine des privilèges. De ce point de vue, pas besoin de conscientiser de l’extérieur la classe ouvrière par une idéologie importée top down.
  2. Quels pourraient être les composants d’une résilience intérieure ? se demande le dernier chapitre du Petit traité de résilience locale (publié en 2015 par l’Institut Momentum). J’en retiens au moins trois : 1/ créer de la beauté « antidote au manque de sens et à la noirceur de notre époque » (page 96), 2/ retrouver le sens du sacré, se reconnecter aux autres et à la nature 7, 3/ cultiver l’espoir actif (lucidité de la situation, rêver d’une belle histoire et se la raconter, avancer pas à pas dans la direction).
  3. Philippe Bihouix dans L’âge des low-tech (Anthropocène Seuil, 2014) dresse une liste de sept commandements pour prendre le contre-pied de la course en avant technologique en préférant ce qu’il appelle les « basses technologies » : 1/ remettre en cause les besoins, 2/ concevoir et produire durable, 3/ orienter le savoir vers l’économie des ressources, 4/ rechercher l’équilibre entre performance et convivialité, 5/ relocaliser sans perdre les bons effets d’échelle, 6/ démachiniser les services, 7/ savoir rester modeste.

Transition : et si nous passions maintenant à l’étape de la vision même de ce que nous pourrions nommer le monde de l’après-décroissance, celui de l’a-croissance, celui d’une société libérée de l’économie, où l’économie n’est que celle d’un état stationnaire ?

C- Utopistes pour l’après-décroissance

1. Ce qui doit décroître

Quels sont les secteurs qui dans une société libérée de l’économie deviendraient parfaitement superflus ? 8

  • Tout le personnel militaire (1700 milliards $) sinon policier
  • Les banques, le système financier et les assurances (15 % du PIB mondial pour ces dernières – 50 000 milliards $
  • La publicité, le marketing (500 milliards), l’industrie du divertissement
  • L’agrochimie, l’agroalimentaire (plutôt une agriculture biologique)
  • Chaque abandon aura des effets démultiplicateurs sur les besoins en édifices, en énergie et en matériaux, en services, en transports, sur la production des déchets 9
  • Chaque abandon devrait résulter d’une forme de décision collective dont les 2 critères principaux devraient être : 1/ la mesure de l’impact écologique, 2/ la récupération de la centralité du temps concret (éviter la contre-productivité en particulier dans les systèmes de transport, de santé et d’éducation – Ivan Illich).

2. Moins mais mieux

On trouve dans le Manuel de Transition de Rob Hopkins un inventaire plus qualitatif que quantitatif :

valeurs_transition

→ Philippe Bihouix consacre tout son Acte III à décrire « la vie quotidienne au temps des basses technologies :

  • Agriculture et agroalimentaire : « La solution est d’accepter de baisser la production (horaire) agricole en réduisant la taille des parcelles, tout en mélangeant à nouveau des activités de culture et d’élevage de taille moyenne. Par exemple pour le maraîchage : démécaniser, combiner fruitiers et légumes, petit élevage.
  • Moins de viande : il faut 14-15 calories végétales pour « produire » 1 calorie animale (seulement 4 pour le poulet) : caricaturalement, plutôt manger le maïs et le soja destiné aujourd’hui aux poules et aux vaches.
  • Rien à attendre du côté du poisson ; pour du poisson d’élevage, il faut 3-4 kg de poisson sauvage pour 1 kg de saumon ou de daurade.
  • Transports et automobile (environ 30 à 40 % des emplois directs et indirects pour le secteur automobile) : il faut sortir de la civilisation de l’automobile (plus d’1 milliard de voiture depuis 2010) → 15% pour les loisirs et 85 % pour des raisons économiques → covoiturage, vélo.
  • Quant aux voitures qui resteront : des « pots de yaourt » à vitesse très limitée (40 à 60 km/h), 1l/100 km de consommation.
  • Bâtiment et urbanisme : moins énergivore, plus du tout d’artificialisation des terres (1% ont disparu en 10 ans), désurbanisation (dé-mégalopoliser), rénover, réutiliser réhabiliter.
  • Consommation courante : interdiction de la publicité (et donc du triptyque infernal : publicité, crédit, obsolescence), retour du vinaigre, du bicarbonate, de la cendre pour le nettoyage, décroissance des voyages et du luxe ostentatoire…
  • Difficiles choix pour les TIC. Sinon souhaiter leur disparition, au moins s’attaquer à la gabégie actuelle : sur les infrastructures de réseaux, sur les serveurs et les centres de données, sur les équipements individuels, sur leur durée de vie, sur un approche plus modulaire de leur composants.
  • Banque et finances : reterritorialiser les secteurs de l’investissement, du dépôt, de l’assurance. Interdire l’intérêt ? « Dans une société économique qui prête l’argent avec intérêt, il est impossible d’éviter la croissance » (page 236).
  • Energie : scénario négawatt + modification des modes de vie (c’est pourquoi j’ai mis ce secteur à la fin).

3. Une révolution du temps libéré

Un premier calcul à la louche consisterait à diviser le temps moyen de travail par l’empreinte écologique. Au niveau français, cela donnerait une petite dizaine d’heures (36 heures / EE = 4). Mais d’un pays à l’autre, les variations seraient importantes et surtout la différence de niveau de vie interdit une moyenne généralisée.

Un autre calcul consiste à calculer secteur par secteur :

  • Primaire : 33,5 %. Secondaire : 22,5 %. Tertiaire : 44 %. Une décroissance économique signifierait une forte décroissance du secteur tertiaire (mis à part les secteurs de la santé, de l’éducation) mais un effet débond du secteur primaire.
  • Les calculs de Jérôme Baschet (il y consacre une annexe) donne : environ 14 heures/semaine pour la production des aliments et des biens manufacturés + entre 10 et 12 heures vouées aux tâches d’organisation de la vie collective.
  • Ces dernières tâches supposent une nouvelle organisation de l’activité : une dé-spécialisation généralisée ou une indivision sociale du travail (en particulier pour les « tâches pénibles »).
  • Aux pages 109-111 de son Adieu à la croissance, Jean Gadrey a dressé un tableau des perspectives pour l’emploi.
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Les notes et références
  1. André Gorz, Capitalisme, Socialisme, Ecologie (Galilée, 1991).[]
  2. http://abonnes.lemonde.fr/idees/article/2016/02/11/il-y-a-obsession-commune-aux-depressifs-et-aux-djihadistes_4863679_3232.html : « Un des grands succès du capitalisme est de nous faire acheter des produits comme autant de petits fétiches, qui nous donnent l’illusion d’une toute puissance à nouveau possible. L’industrie des films, des jeux vidéos, des vêtements, des parfums, du tabac, des cosmétiques ou des voitures, nous proposent d’acquérir un objet magique à la source de brillance, de liberté et d’une démultiplication des capacités. Un objet forcément à durée de vie limitée. »[]
  3. Pourquoi les ados se font-ils mal ? Philippe Jeammet, dans Sciences Humaines, n°279, Mars 2016, pages 38-39. Ils se font mal parce qu’ils ont mal et parce qu’ils préfèrent « s’infliger soi-même ce que l’on craint de subir que de se le voir imposer par autrui. Parce que ces « formes d’attaques du corps » (accoutrements, tatouages, piercings, scarifications, anorexie), ces conduites autodestructrices permettent « d’éponger la souffrance, véritable anesthésique affectif. L’émotion – tristesse, angoisse, stress, etc. – s’efface au profit de la sensation – douleur, faim, etc.[]
  4. Décroissance, vocabulaire pour une nouvelle ère, page 461.[]
  5. Id., page 40.[]
  6. « transcendance intramondaine » de la Théorie critique : Horkheimer, Honneth, Rosa[]
  7. L’une des causes de ces maladies modernes que sont le stress, le déficit d’attention, la dépression est le « désordre de déficit de la nature ». Une étude récente, de décembre 2015 parue dans le Clinical Psychological Science, montre que l’un des meilleurs moyens de lutter contre le stress est de s’engager quotidiennement dans des comportements altruistes[]
  8. Jérôme Baschet, Adieux au capitalisme, La découverte, 2014, pages 90 & sq.[]
  9. « Aujourd’hui, nous produisons l’équivalent de 3 containers par an, soit 5 kilos par personne et par an. » Bien moins que la moyenne des Français, qui produisent 470 kg d’ordures ménagères (poubelles et tri) chaque année : http://www.bastamag.net/Vivre-au-sein-d-une-famille-zero-dechet-un-nouveau-luxe-pas-si-contraignant[]

Un commentaire

  1. J’aurai le plaisir de vous accueillir au salon Primevère. On peut se retrouver une demi-heure avant la conférence à l’espace bénévole ou 1/4 d’heure avant devant la salle violette. J’y serais aussi de 16h à 17h30 pour la conférence de Charles Rojzman.
    On s’était vu aux rencontres des objecteurs de croissance à Notre-Dame-Des-Landes.
    A vendredi
    Benoit

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