Quelle différence entre décroissance et objection de croissance ?

A première vue, il n’y aurait là qu’une querelle de mots qui aurait due être depuis longtemps tranchée entre, d’un côté, l’élégance d’une expression-référence à la résistance des « objecteurs de conscience » et de l’autre un mot malheureux tant par son préfixe – « dé- » aurait une connotation seulement négative – que par sa racine – on en resterait encore à une définition-révérence par rapport à la « croissance ».

–        Répondons d’abord qu’il y a de très beaux mots – et de très belles pratiques associées – qui commencent par ce préfixe : par exemple, je préfère « débattre » que me « battre ».

–        Et même dans le négatif du « dé- » de décroissance, il y a l’idée que les décroissants savent plus facilement ce qu’il ne faudrait pas faire  que ce qu’il faudrait faire. Et en effet, nous savons quel monde nous ne voulons pas/plus ; pour autant, pour les mondes que nous voulons, les expérimentations et les discussion sont ouvertes…

–        Continuons en répondant à ceux qui jugent que le mot n’est ni « séduisant » ni « attractif » que le but des « décroissants » n’est peut-être ni la séduction ni l’attraction.

–        Quant à lui ajouter un qualificatif « soutenable », « sereine », « conviviale », il n’y a là en fait qu’une astuce qui ne fait que reculer d’un pas la question. Car une fois ces adjectifs validés, il faut bien en venir à se demander à quoi ils se rapportent, bref reposer la question de la décroissance en tant que telle.

–        C’est vers 1970, quand l’empreinte écologique tenait encore sur une seule planète, qu’il aurait peut-être été pertinent de refuser le terme de « décroissance ». Mais aujourd’hui les seuils sont largement dépassés et la question qu’il faut se poser, c’est bien celle de la transition vers une société dans laquelle il redeviendra possible de seulement objecter à la croissance. Si les « décroissants » veulent un retour en arrière, c’est celui-là : retrouver une époque où il redeviendra sensé d’objecter.

–        En attendant, il faut bien poser la question qui fâche : celle de la transition vers une société socialement juste, écologiquement responsable, humainement décente, politiquement démocratique. A condition que cette « transition » soit « volontaire », elle est la « décroissance ».

–        Au niveau mondial, la décroissance signifie très clairement une réduction de l’empreinte écologique totale (l’empreinte carbone incluse).

–        Dans les pays dits « riches », où l’empreinte écologique par personne est supérieure au niveau mondial acceptable, la décroissance signifie pour les plus riches une décroissance de leurs revenus, de leur niveau de vie…

–        Et partout où domine la pauvreté, la décroissance signifie une décroissance des inégalités. Rien qu’en « étêtant » les plus hauts revenus, il y a déjà largement de quoi assurer un revenu décent à tous.

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Sur cette question du mot de « décroissance », on peut lire, dans la revue permanente du MAUSS :

Un commentaire

  1. J’ai parmi d’autres mots une très forte préference pour ceux d’Ivan Illich :  » la désaccoutumance à la croissance  » qui ne claque pas comme un nouveau mot d’ordre, mais qui fait réference à une maladie ou les plus atteints devraient se soigner  » la croissance « .
    Illich écrit sur ce sujet :
    « la désaccoutumance de la croissance sera douleureuse. Elle sera douleureuse pour la génération de transition, et surtout pour les plus intoxiqués de ses membres. Puisse le souvenir de telles souffrances préserver de nos errements les générations futures »
    Bernard Bruyat chercheur indépendant secessionniste

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